Paul Ardenne

Paul Ardenne avoue une notoire difficulté à se définir. En vérité, il n’a jamais su choisir entre création (la littérature de fiction, me concernant) et l’essai (sur l’art, sur l’architecture, sur la culture contemporaine). Il est historien de formation et ce n’est sans doute pas un hasard. L’histoire est une discipline multiface. L’historien scrupuleux, s’il s’intéresse aux faits humains et à leur enchaînement, se doit aussi de s’informer quant à l’évolution des mœurs, des sciences, de la morale, du droit, de la technique, des idées et de la symbolique. Il lui est interdit de choisir sous peine de confiner son étude à un seul champ seulement de la réalité et, partant, de risquer l’invalidation de ses conclusions. L’ouverture, pour l’historien, est de rigueur, contre la crispation académique et l’étude contenant ou restreignant son champ d’investigation.

Pourquoi l’art dit « contemporain », entre les multiples formes de l’expression culturelle humaine, l’intéresse-t-il particulièrement ? La raison principale réside dans son ouverture totale, son élasticité toujours plus grande et l’impossibilité qu’il y a de le circonscrire au registre du genre. L’art dit « contemporain », ce sont tout autant la peinture, la sculpture, la performance, les installations, la composition digitale en réseaux, les expéditions, la création participative, les groupes de parole, la mise en place d’entreprises commerciales… sans limitation des pratiques et des « façons de faire », les maniera : l’artiste décide de ce qu’est l’art et de la forme qu’il prend. Jusqu’à souhaiter produire un art « invisuel » si tel est son projet, une création destinée au champ des arts visuels mais conçue de manière à s’y rendre invisible.

L’offre infinie de ses formes, sa dimension infiniment prospective caractéristiques font pour lui de l’art contemporain une forme d’expression culturelle passionnante. Plus par exemple que la littérature, le cinéma, le théâtre ou le cirque. Ces derniers, parce que corsetés dans des genres particulièrement définis, sont des formules où expérimenter devient difficile et où déborder les cadres reviendrait à devoir changer de genre, en se reniant. Là où l’art contemporain, pour sa part, reste le plus stimulant des périmètres culturels où constater, donner sa forme et pouvoir penser le désir humain de la mutation, contre les forces de solidification et de pétrification.

Agrégé d’Histoire, docteur en Histoire de l’art, universitaire (UFR Arts, Amiens), collaborateur, entre autres, des revues Art press, Archistorm (France) et INTER (comité de rédaction, Canada), Paul Ardenne est l’auteur de plusieurs ouvrages ayant trait à l’esthétique actuelle : Art, l’âge contemporain (1997), L’Art dans son moment politique (2000), L’Image Corps (2001), Un Art contextuel (2002), Portraiturés (2003). Autres publications : Extrême – Esthétiques de la limite dépassée (2006), Images-Monde. De l’événement au documentaire (avec Régis Durand, 2007), Art, le présent. La création plastique au tournant du 21e siècle (2009), Moto, notre amour (2010), Corpopoétiques 1 (2011) et 2 (2013), Cent artistes du Street Art (2011), Un Art écologique (2018), Apologie du Dragster (2019).

Il est également romancier : La Halte (2006), Nouvel Âge (2008), Sans visage (2010), Comment je suis oiseau (2014), Belly le Ventre (2016), Roger-pris-dans-la-terre (2017), L’ami du Bien (2021)…

Curateur en art contemporain, Paul Ardenne a conçu les expositions « Micropolitiques » (Magasin, Grenoble, 2000), « Expérimenter le réel » (Albi-Montpellier, 2001 et 2002) et « Working Men » (Genève, 2008). Il a été l’un des commissaires invités de l’exposition « La Force de l’art » au Grand Palais, à Paris, en mai-juin 2006.
Autres commissariats d’exposition (liste non exhaustive) : « Ailleurs » (Paris, 2011), « Art et bicyclette » (avec Fabienne Fulchéri, Mouans-Sartoux, 2011), « WANI » (avec Marie Maertens, Fondation Ricard, Paris, 2011), « L’Histoire est à moi ! » (Printemps de Septembre à Toulouse, festival de création contemporaine, édition 2012), « Aqua Vitalis » (avec Claire Tangy, Caen, 2013), « Motopoétique » (MAC Lyon, 2014), « L’oiseau volé » (Paris, 2014), « Économie humaine » (HEC Paris, 2014), « Filip Markiewicz, Paradiso Lussemburgo », Pavillon du Luxembourg, 56ème Biennale d’art de Venise (2015), « Fragmentations », Hybride 3, biennale de Douai (2015), « Dendromorphies » (Paris, 2017), « NATURA LOCI » (Canada, 2018), « Humanimalismes » (Paris, 2020), « Courants verts – Créer pour l’environnement » (Fondation EDF, Paris, 2020), « L’anthropocène et après » (Saint-Denis-de-la-Réunion, 2020-2021), Hybride 4 (Lens, 2021)…

Dans le domaine de l’architecture et de l’urbanisme, il est l’auteur de plusieurs monographies d’architectes (Rudy Ricciotti, Jean-Paul Viguier, Philippe Gazeau, Alain Sarfati, Jacques Ferrier, Franklin Azzi, 5+1AA, Alfonso Femia…) ainsi que des ouvrages Terre habitée. Humain et urbain à l’ère de la mondialisation (2005, rééd. augm. 2010), La Bonne ville (2021) et Architecture, le boost et le frein (2021). Il tient la rubrique « Blockbuster » dans la revue Archistorm.